La vérité si je mens

Au mois d’avril 2024 a eu lieu à l’OCDE la 35e session du Working Party on Digital Economics, Measurement and Analysis (WPDEMA). La section Structure et analyses économiques (WSA), en charge notamment du thème de la société de l’information et de la numérisation, était présente. Lors de cette session, les résultats préliminaires d’une enquête commanditée par l’OCDE intitulée OECD Truth Quest Survey ont été présentés (les résultats n’ont pas encore été diffusés publiquement). Cette enquête mesure la capacité des internautes à reconnaître des contenus faux ou trompeurs en ligne; ces derniers pouvant aller de la simple satire jusqu’à l’information de propagande et aux fake news. Ainsi, plus de 40 000 personnes de 21 pays — dont la Suisse — ont été interrogées.

Disons-le tout de suite, les premiers résultats ne sont guère brillants et la Suisse n’y échappe pas. Au niveau des 21 pays, l’identification d’une vraie ou d’une fausse information n’a été correcte que dans 60% des cas. Sur les 21 pays, la Suisse finit en queue de peloton, laissant derrière elle seulement la Colombie et le Brésil. Sans surprise, le reste de l’enquête a montré que les internautes surestimaient leurs capacités à identifier des contenus trompeurs. Les premières analyses montrent que les pays dont les internautes utilisent le plus fréquemment les réseaux sociaux sont les pays les plus mal classés de cette étude.

Nous participons activement à alimenter le débat démocratique avec des informations statistiques fiables et transparentes.

Pierre Sollberger, section WSA

La lecture de ces mauvais résultats m’interpelle doublement. En premier lieu, je me sens rassuré quant à la pertinence des statistiques produites à l’OFS.

En effet, en 2022 déjà, la section WSA, grâce à l’enquête Omnibus-TIC mesurant l’utilisation d’internet par les ménages, avait publié un Actualités-OFS sur la perception et les actions prises par les internautes face à la désinformation en ligne.

Nous étions déjà surpris à l’époque des premiers résultats (actualisés depuis) qui montraient une part relativement faible (en comparaison internationale) d’internautes en Suisse déclarant avoir vu des contenus trompeurs en ligne.

Ma deuxième réflexion, plus large celle-ci, porte sur l’importance de notre travail et de la mission de l’OFS. Depuis plusieurs années, dans un contexte d’instabilité géopolitique croissante, on observe la prolifération de fake news et de manipulations de l’information. Ceux-ci polluent de plus en plus les débats politiques et les élections de nombreux pays démocratiques. C’est peut-être dans ces instants les plus sombres qu’il est bon de se remémorer l’importance (je dirais même la chance) de pouvoir produire et diffuser publiquement, sans restriction, une information statistique fiable, de qualité, et ce, de manière indépendante. Partant de ce point, cela signifie aussi que nous tous à l’OFS, par notre travail quotidien et l’ensemble des diffusions qui en découlent, participons activement à alimenter le débat démocratique avec des informations statistiques fiables et transparentes.

Pierre Sollberger est chef du groupe «Science, technologie et société de l’information» et suppléant du chef de la section WSA.

Complément d’informations:
Yves Froidevaux, collaborateur scientifique en charge de l’enquête Omnibus-TIC
Carole Liechti, collaboratrice scientifique en charge des systèmes d’indicateurs de la société de l’information et de la stratégie Suisse numérique
Actualités OFS: Désinformation en ligne – perceptions et actions
Omnibus 2023: enquête sur l’utilisation d’Internet
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